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Recherche et sauvetage en mer : une victoire importante au Parlement européen, mais beaucoup reste à faire

Avec un ordre du jour ambitieux, le Parlement européen s’est réuni en juillet pour sa dernière session avant la pause estivale. De nombreux dossiers, qui doivent être conclus avant la fin du mandat l’année prochaine, ont progressé. L’adoption de la résolution du Parlement, appelant à une action de l’Union européenne en matière d’opérations de recherche et de sauvetage en Méditerranée, est l’une de nos victoires.

Initiée par Renew Europe et soutenue par les principaux groupes parlementaires du Parlement européen, cette résolution constitue une avancée sans précédent au sein de notre institution. Par ce texte, nous demandons la mise en place d’une mission européenne de recherche et de sauvetage, qui soit complète et pérenne. Cette mission doit être mise en œuvre non seulement par Frontex, l’agence européenne de garde-frontières, mais aussi par les États membres. Il s’agit là d’un acte nécessaire, d’une obligation légale en vertu du droit communautaire et international, mais aussi — et surtout — d’un acte humain, d’une démonstration de solidarité qui souligne l’engagement de l’UE à défendre ses valeurs fondamentales de compassion et de respect de la vie humaine.

L'importance de cette résolution ne saurait être sous-estimée. Depuis janvier, près de 2 000 migrants ont perdu la vie en traversant la Méditerranée. Le mois dernier, un navire transportant des réfugiés a chaviré au large de Pylos, en Grèce, entraînant la noyade de près de 600 d’entre eux… Alors que les garde-côtes grecs affirment que le navire a refusé toute aide avant l'incident, une enquête de la BBC émet des conclusions différentes, indiquant que le bateau fut probablement en situation de détresse des heures avant le naufrage. Si elle est avérée, cette négligence constituerait une violation accablante du droit international. Cependant, aucune obligation de rendre compte n’existe à ce stade, et l’enquête menée par les autorités grecques sur cette tragédie restera confidentielle. Avec les propositions inscrites dans notre résolution, il serait mis fin à une telle confidentialité. Mises correctement en œuvre, les règles de transparence et de responsabilité européennes s’appliqueraient à ces naufrages, garantissant ainsi l’indépendance, la rapidité des futures enquêtes et la découverte de la vérité.

Pendant longtemps, les États membres n'ont pas pleinement assumé leurs responsabilités en matière de recherche et de sauvetage, laissant les ONG combler leurs lacunes. Leur altruisme est, à bien des égards, louable mais la recherche et le sauvetage constituent des obligations qui incombent aux États. Notre résolution reconnaît enfin cette responsabilité de l’Union européenne, tout en renforçant les capacités et le rôle de Frontex. Elle prévoit également des mesures concrètes de responsabilisation des États membres et accorde à la Commission un plus grand rôle en matière de coordination des opérations en mer ainsi que la charge d'évaluer les pratiques des garde-côtes des États membres en la matière.

Parallèlement, la lutte contre les passeurs et les trafiquants d'êtres humains doit être, au sein de l’UE, un élément essentiel de notre mission globale et pérenne en matière de recherche et de sauvetage. Nous devons démanteler les réseaux criminels qui surchargent leurs navires et créent des situations dangereuses, y compris dans les pays tiers. Nous appelons la Commission, le Conseil, les États membres et tous les autres acteurs concernés à mettre en œuvre les propositions du Parlement européen.

Cependant, beaucoup reste à faire. La crise humanitaire en Méditerranée est le symptôme d'un problème plus large qui, depuis des années, menace la responsabilité internationale de l’UE : l’absence de voies sûres et légale. La présidence espagnole du Conseil, qui a pris ses fonctions le 1er juillet, a fait de cette question une priorité et a exprimé son intention de finaliser, au cours des six prochains mois, le nouveau pacte Asile et migration, en négociation depuis 2020. Son adoption nécessitera des efforts législatifs concertés de la part de la présidence, mais il est impératif que nous coopérions pour mener à bien ce travail essentiel.

Le pacte Asile et migration permettrait de rationaliser les procédures d'asile, de renforcer les contrôles aux frontières extérieures, de mettre en œuvre des mesures visant à mieux intégrer les migrants et les demandeurs d'asile dans la société européenne ou encore de définir davantage les exigences de transparence concernant les incidents migratoires. Plus généralement, il ancrerait formellement la politique d'immigration de l'UE dans la solidarité et le partage des responsabilités.

Des progrès ont été réalisés à propos de cette importante mesure. En effet, au début de cette année, le groupe Renew Europe a joué un rôle clé pour assurer une majorité transpartisane, permettant au Parlement d’adopter sa position sur les textes du Pacte. Depuis lors, le Conseil s'est mis également d'accord sur sa position de négociation sur plusieurs textes clés, notamment sur le mécanisme de solidarité obligatoire, qui permettrait d'alléger la charge pesant sur les États membres méditerranéens, balkaniques et d'Europe de l'Est. Toutefois, le Conseil doit encore trouver un compromis sur l'un des éléments les plus importants : le règlement de crise, qui établira des règles spécifiques pour l'application de la législation sur les migrations en cas d'urgence. Pour que le pacte soit efficace, nous devons clairement définir les limites de ce texte afin qu'aucun État membre ne puisse abuser des pouvoirs inclus dans une telle clause.

Mais le temps presse. Pour mettre en œuvre ces réformes d'ici la fin du mandat, le Conseil et le Parlement doivent parvenir à un accord d'ici février 2024. Si nous ne parvenons pas à prendre de l'élan, la réforme du système d'asile et de migration européen s’éteindra, condamnant encore davantage l'Europe à son système dysfonctionnel actuel. La présidence espagnole a l'énorme responsabilité de veiller à ce que nous parvenions à un accord. Le groupe Renew Europe est prêt à entamer des négociations rapides et pragmatiques. Des vies sont en jeu.

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